jeudi 25 juillet 2019

Baptiste Trotignon Trio. Sunside 24/07/2019


 
Quand j’arrive au Sunside à 10h, au milieu du 1° set, Baptiste Trotignon est en train de chorusser sur une ballade dont j’ignore le titre et c’est d’emblée magnifique : le son du piano, le phrasé, les voicings… puis Clovis Nicolas prend un solo de basse impérial, tout dans les graves de l’instrument, tout ancré, tout rooted — comme disent les Rosbifs/Hamburgers. Suit une autre ballade, d’une majestueuse lenteur. Le trio l’expose en laissant beaucoup d’espace pour que la mélodie respire autant qu’elle peut et on est (nait) dans la beauté pure. Les micro-accélérations du piano sur une rythmique calme et placide sont du meilleur effet.  Trotignon nous fait son Ahmad Jamal et ça passe sans accroc, tout en douceur, comme une lettre à la poste (pas La Poste d’aujourd’hui, Zeus nous en préserve ! D’ailleurs l’être hait le néant, tout le monde sait ça). 
 
Là encore Nicolas se fend d’un chorus dans le haut de la basse que Trotignon alimente d’accords magnifiques tandis de Tony Rabeson fait crépiter ses cymbales et ponctue le tout de petites bombes subtiles sur ses toms. Entre-temps le pianiste s’est lancé dans un solo up tempo qui déboule avec une vélocité jamais démonstrative.
Le deuxième set débute avec un groove tellurique et sensible qui nous scotche à notre siège déjà humide de sueur (oui, vous savez, la fameuse Kahn y cul…) et Baptiste est toujours aussi subtil et plein de nuances — ce type a décidé de nous tuer, c’est clair comme de l’eau de Roach —Max, dont Rabeson est un lointain (enfin pas si loin, tiens) neveu. Un petit échange de 4/4 piano-drums vient maître les choses aux poings puis Clovis fait bourdonner sa grand-mère tandis que Baptiste lui envoie derrière des voicings affutés et que Tony crépite des saints balles comme un doux taré qu’il est. 
 
Puis le solo de piano est tellement dedans qu’on s’y immerge avec amour, délices et ogres. Ces trois mecs sont tout simplement for-mi-dables et ce ne sont pas Franck Amsallem, Christian Pégand ou Vincent Hamamdjian (le bassiste électrique que j’ai rencontré à l’entracte) qui me contrediront sinon je leur défonce la tronche : vous me connaissez, je suis un Viking afrrrricain — prrrrésentement là dis donc — et si je t’aime je te fais plein de hugs ‘n’ kisses mais si tu me les brises je te découpe en rondelles façon carpaccio. Ma, cazzo, ci mancherebbe meno !).
Le morceau suivant est un hommage à Joao Gilberto récemment DCD et c’est encore une ballade d’une douceur tonique (Rabeson) où les voicings lumineux de Baptiste sont tout simplement éblouissants. Clovis chorusse tout en retenue et en puissance intériorisée puis Baptiste reprend, tout près de la mélodie qui est si limpide qu’elle se suffit à elle m’aime. Et si mon voisin se met à chialer sur mon MacBook je risque de me fâcher — mais comment se mettre en colère quand vos oreilles absorbent goulument tant de beauté. Hein, comment ? Hein ? Dites moi.
Suit un thème de Charliiiiiie Par Cœur en tempo moyen que Clovis entame à la basse avant de se lancer dans une walking souple et grooveuse que Tony accompagne d’une cymbale ride raffinée et polyrythmique (et non pas trop polie pour être au net, j’te f’rai dire) et sur laquelle Baptiste solotte en digne petit-fils de Bud Powell. S’ensuit le premier solo de Tony avec un son de batterie musical en diable (ce type sait accorder ses fûts !) et ses cymbales résonnent comme dans une putain de cathédrale. Baptiste reprend à un tempo ralenti et fait péter le cantabile du piano puis les trois reprennent le thème en tempo moyen et l’affaire est pliée : c’est  simple, on jubile ! 
 
Suit un très beau morceau (de Baptiste ?) sur lequel le piano chorusse sans rythmique avant que ses deux compères ne le rejoignent pour une course poursuite échevelée entre les harmonies et les phrases mélodiques que le piano distille comme les foutues abeilles produisent leur putain de miel.
Et le second set se termine sur « Full House », de Wes Montgomery, que je n’avais jamais entendu joué par un trio de piano et qui sonne comme une évidence tant il est entonné avec le cœur, les tripes et le cerveau (que j’appelle « les tripes d’en haut » car je vous rappelle, lecteurs aimés — oui toi Rodogune et toi Abderrachid, toi Gontran et toi Maria Mercedes de la Cruz,  sans oublier le petit Jean-Baptiste qui kiffe sa reum au premier rang du public du Sunside — que le cerveau, comme le cœur, le foie, le pancreas, les 1 test1… est un foutu viscère qui palpite dans sa boîte crânienne si on sait en faire un usage autre qu’intellotechnocratique de mes 2).
 
Alors voilà, le concert est fini et l’auditoire se disperse, ému et comblé. On va raconter cette soirée mémorable à nos êtres chairs et on va le stocker dans notre mémoire vive pour l’éternité en regrettant que cette soirée n’ait pas été enregistrée.
Baptiste Trotignon a re-suscité (ressuscité) le trio de ses 25 ans — Halle-fuckin’-lujah ! Blesse ze lord ! — (qui avait enregistré en 1999 un superbe « Fluide » sur le label Naïve — voir la chronique de mon excellent confrère Thierry Quénum dans les archives de Jazz Magazine) et c’est un événement majeur   
 
Il eût fait beau voir que cela ne se sût point.  C’est maintenant sur Blog 2 Garenne.
Merci qui ?
Max Granvil (qui d’autre ? Bordel aqueux!)
Baptiste (g) et Christian Pégand (d) à la terrasse du Sunset/Sunside après le gig.

dimanche 21 juillet 2019

Un bien beau premier envol (maiden voyage, en GB/US: ça vous rappelle rien?)


 
Le 21 juin 2019 (le jour le plus long, que nous appelions jadis la St. Jean, que les scandinaves nomment Midsommar et qu’ils fêtent par des rites païens lesquels se dispensent depuis quelques années des traditionnels sacrifices humains à Thor et à travers — eh oui, les temps changent !), le 21 juin — disais-je donc avant que je ne divaguasse — est sorti assez discrètement un skeud qui, si je n’mabuse (docteur),  va vous accompagner tout l’été, vous tenir compagnie en automne et vous réchauffer les miches (et les zoreilles aussi, pardine) tout l’hiver avant que le printemps ne revienne.
Midsommar en Suède (plus baba tu meurs, non?)


Aye pas peur, fillette, les sacrifices humains C fini!

































Ce disque a été réalisé par une jeune (à peine néo-quadra) saxophoniste du nom de Virginie Daïdé.
Vous ne la connaissez pas (et moi non plus jusqu’à ce que son attachée de presse m’envoie l’info sur la sortie de son CD et sur le concert y afférant) mais vous allez la découvrir. Et y a-t-il plaisir plus délectable que celui de dé-couvrir un nouveau talent.
 
Et du talent, Miss V (c’est comme ça que je l’appelle) en a à revendre, aussi bien en tant que souffleuse de ténor qu’en tant que leadeuse de son band ou en tant qu’arrangeuse/compositrice d’une partie de son répertoire. Lequel est consacré à Antonio Carlos Jobim, immense compositeur brésilien dont certaines oeuvres sont malheureusement tombées dans le cliché rebattu à force d’avoir été passées en boucle à la radio ou sur vos platines.
Mais Miss V. a eu l’intelligence de ne pas choisir les « scies » jobimiennes et nous fait (re)découvrir des morceaux plus rares du compositeur carioca.
Et (un bonheur ne venant jamais seul) Miss V a choisi pour ce premier enregistrement sous son nom un invité à la fois de prestige et de cœur. Devinez qui ?
My main man Tom Harrell, rien moins ! Tommy boy, sa trompinette et son bugle magiques qui apportent à la séance leur douceur, leur drive et leur pertinence titanesque. Car Tom Harrell est un géant du jazz contemporain : le meilleur successeur des cadors du hard bop historique (il a joué plusieurs années dans le quintet d’Horace Silver puis dans celui de Phil Woods — excusez du peu). Il est aussi l’un des plus fins compositeurs/arrangeurs/joueurs de latin jazz.
Tommy Boy, my main man! 😀😃😇😉😊😎
Autant dire qu’il cadre parfaitement avec l’esthétique du disque de Miss V, laquelle esthétique se rapproche un peu — au niveau de la qualité du son (un vrai son de groupe : chaleureux, rond, ductile…) — de celle de la West Coast (Gerry Mulligan — et le baryton du groupe, M. Pierre-Olivier Govin, est clairement le G. Mulligan français —, Marty Paich, Bud Shank, Buddy Colette, Shorty Rogers…) ce qui est évidemment délectable.
POG
 Les autres membres du band sont pour moi d’illustres inconnus, mais on s’en br… euh tape car il sont illustres (justement) et qu’on apprend vite à les connaître.
Le guitariste (au nom brésilien) Leonida Fava assure un soutien rythmique, mélodique et harmonique tout à fait sensible et intelligent, le bassiste (au nom italien) Luca Fattorini tient la baraque (comme il est de tradition de dire) de façon admirable. Quant au batteur, c’est M. Donald Kontomanou — qu’on ne présente plus.
Leonida F.
 










Luca F.





















Donald K.























Agnès V.
Et, délicieuse cerise sur ce savoureux gâteau : sur quelques titres intervient une violoncelliste (Agnès Vesterman) dont les coups d’archets se mêlent à la pâte sonore d’ensemble de façon pertinente et savoureuse.
Et la leadeuse-saxophoniste dans tout ça, me direz-vous. Allez, eMGé, qu’en penses-tu ? Fais péter, man !
Eh bien vous vous doutiez bien que je la gardais pour la faim/fin.
Primo, elle ne tire jamais la couverture à elle et laisse de l’espace à ses sidemen/women. Secundo sa sonorité de ténor est veloutée et son phrasé fluide sans le moindre tape à l’œil. On sent qu’elle a écouté Stan Getz et Mark Turner (au moins) et elle affiche une belle maturité qui fait de ce premier enregistrement personnel une totale réussite.
Stan the Sound

Miss V, les cheveux dans le vent
Achetez ce skeud et offrez-le à vos proches (c’est un ordre !), vous ne le regretterez pas et vous ferez des heureux. Car après tout, comme dit mon pote Baruch Spinoza, que cherchons nous

 sinon le bonheur, tout simplement.
Et le CD de Miss V. (qui, au passage, a l’intelligence de durer à peine 40mn) est un putain de booster de bonheur. Fiez-vous à l’ordonnance du Dr. Max Granvil (ah, vous ne saviez pas que j’avais exercé la médecine un certain temps avant que des collègues jaloux me fassent radier par le con - seil de l’ordre).
Allez en paix, mes frèrots/seurettes avec dans les oreilles la zik à Miss V !
Le large sourire qui barre votre face joviale vous distingue de tous les blaireaux aux oreillettes vissées des deux côtés de leur tronche (vous savez comment j’appelle les lecteurs mp3 des usagers du métro et du RER ? Des suppositoires à oreilles : effet sédatif garanti !).
Capturer l'univers! Et ta soeur, elle capture l'univers, ta soeur?
Vous, vous êtes HEUREUX, et ça se voit/sent à l’œil/au nez nus.
"Je suis le chat qui s'en va tout seul, et tous les lieux se valent pour moi" (Rudyard Kipling : "Histoires comme ça")
Vive la nudité, donc, bordel !
 
Max Granvil

PS : CD : « Dream Jobim » DSY Team Zic/L’autre distribution
PPS : Concert de sortie de disque le 10/09 au Sunset (rue des Lombards).
PPPS : visitez www.virginiedaide.com

vendredi 19 juillet 2019

Youn Sun Nah, Parc Floral de Vincennes, FJP, 19/07/2019


 
Youn Sun Nah, c’est ma tendresse ! Alors ne vous étonnez pas si je l’encense (non je n’ai pas apporté mes bâtonnets d’encens au concert, faut pas exagérer quand m’aime !). Par contre je suis venu dès l’après-midi à la balance-son, histoire de la voir/entendre un peu avant que ne commence la cérémonie — un concert de Youn est toujours une sorte de cérémonie, à la fois païenne et spirituelle, recueillie et conviviale, bouleversante et renversante. Cette femme exsude la beauté asiatique et occidentale. Elle est un confluent, une synthèse magnifiquement réussie et affinée au fil des ans et je n’arrive pas à en dire le moindre mal car j’ai beau la connaître bien depuis des années elle réussit toujours à me surprendre, comme elle enchante tous les publics devant lesquels je l’ai vue chanter. Je discute aussi un peu avec Axel Matignon, son manager/psychologue/confident, qui est un vieux pote et qui assure la logistique avec efficacité et discrétion depuis des années. Bref, c’est la famille !
Avant les embrassades avec Miss Youn (on ne s’est pas vus depuis quelques années car elle a fait une pause dans sa carrière et moi itou), qui vois-je sur scène derrière sa batterie et pas loin de sa contrebasse ? My main man Rémi Vignolo — qui joue rarement des deux et qui est le seul en France à faire ça, à ma connaissance — ainsi qu’un guitariste-pianiste dont j’ignorais jusqu’à l’existence : Tomek Miernowski, né en Pologne et vivant à New York depuis son enfance. En fait le groupe — un trio fort atypique — n’est pas celui annoncé dans le programme et c’est aussi bien comme ça parce que Rémi Vignolo à la batterie ET à la basse et ce Tomek qui se chauffait les doigts pendant la balance en jouant du Bach à la guitare acoustique PLUS Youn, ça promet dès le soundcheck d’être une foutue tuerie !
On cause et on grignote dans les loges avant le concert. Tout le monde est très relax et à la fois très concentré. Ils sont un peu fatigués car ils reviennent d’un festival en Tchéquie et ils ont voyagé pendant toute la journée, mais ils sont en pleine forme et on sent que ça va pulser en force et en douceur. 
Sur un vamp de basse en pizzicato et des arpèges de piano la voix de Youn s’élève, lente, magnifique dès les premières notes avec un phrasé qui laisse une grande place  au silence et la magie s’installe dès les premières notes de cette mélodie qui dure à peine quelques minutes. Puis Rémi s’installe à la batterie, aux balais (j’allais écrire « ballets » car il fait rapidement danser ses baguettes puis ses mailloches sur les toms et les cymbales tandis que la voix s’enfle sur un nouveau morceau très court également. Suit un thème en scat souple et vivace que la batterie accompagne d‘une pulsation mélodique d’une tonicité polyrythmique subtile tandis que la guitare se lance dans un solo acoustique splendide, proche de la musique baroque. Ces deux instrumentistes sont clairement de grands musiciens, de grands mélodistes et Youn les écoute en silence avant de reprendre son scat mêlé d’envolées dans les graves puis les aigus, jamais criards. Cette chanteuse sait décidément organiser la musique et jouer d’une tessiture d’une splendide étendue sans forcer, sans jamais recourir à l’effet gratuit. Le public fond et applaudit à tout rompre, l’ovationne, conquis au bout de quelques minutes de ce qu’il faut bien appeler une cérémonie (je sais, je me répète, mais pas eux). 
D’ailleurs Rémi empoigne de nouveau sa contrebasse pour un solo absolu grave et profond que ses deux comparses observent avec attention. Cette écoute palpable sur scène ce — osons le terme — recueillement sera l’un des fils conducteurs d’une prestation de toute beauté, dont on n’en finirait pas de détailler les méandres, les sinuosités, les nuances. Youn est maintenant seule avec la basse de Rémi — Tomek a momentanément quitté la scène — et combien d’autres chanteuses osent le duo voix/basse ? Sheila Jordan, Karin Krog, Jen Shyu…
Une ballade somptueuse suit maintenant avec le clavier et les percussions discrètes de Rémy. La voix tantôt ample tantôt proche du murmure module les paroles en anglais de la chanson qui s’installe dans la durée, telle un fleuve majestueux dans son lit et l’on écoute médusé cette coulée vocale tandis que la batterie fait monter la tension sur les arpèges délicats de la guitare égrenant de subtiles harmonies.  Je me suis un moment éloigné de la scène pour discuter avec Axel le manager, tout en écoutant d’une oreille la cérémonie se dérouler et les morceaux d’une grande variété se succéder : thèmes de Youn, de Leonard Cohen, de Marvin Gaye, de Michel Legrand… Mais d’un coup je suis « convoqué » dans la salle : Youn entonne une chanson rock au maximum de sa puissance dans des growls telluriques pendant que ses deux musiciens « bucheronnent » une rythmique binaire énorme et intelligente. Ca déménage grave, c’est une orgie musicale dont la dramaturgie fait léviter l’auditoire et Youn est la grande prêtresse de cette tuerie mélodico-rythmique, la « sorcière » de ce sabbat sonique. Puis c’est le rappel tendrement mélodique en duo avec la guitare acoustique. Cette chanteuse est une magicienne, une Maria Callas, une Sarah Vaughan, une Leontyne Price, une Dianne Reeves… du jazz ouvert — et pas que. Si elle joue près de chez vous courez l’entendre. Ses concerts sont une splendide thérapie humaine autant que musicale et je vais de ce pas faire usage de mes relations en haut lieu (car j’ai le bras long, savez-vous, derrière mes airs passe-partout) pour faire en sorte que ses concerts soient remboursés par la sécurité sociale et mettent la moitié des psys de l’Hexagone au chômage !
 
Max Granvil

jeudi 18 juillet 2019

Clovis Nicolas & Nine Stories, Sunside, 18/07/2019


Eh merde : j’étais en fin de blindfold test, dans ma luxueuse demeure audonienne, avec my main man Jean-Jacques Elangué et on finissait de déguster la cuisine afrrrricaine que je lui avais préparée (prrrrésentement, là dis donc) quand il s’est mis à flotter dru !
Pute borgne, on ne va pas pouvoir aller au Sunside en scooter, et la Maserati est au garage pour révision ! Il va falloir prendre le #@§%* de métro. Se mêler à la « multitude vile » (cf. Baudelaire, toujours lui) pour aller entendre le band de Clovis Nicolas. Et on a déjà raté la moitié  du premier set.
Bon, on arrive à l’entracte. On fait des bises à la moitié du public (des zicos pour la plupart — pas un de mes collègues journaliste n’est là, tant pire pour leur gu… tronche). Puis le 2° set commence et dès le départ y’a du son grave de chez grave. La salle est à moitié vide mais on s’en br… euh bat les couettes, j’veux dire, car le public présent est super réceptif. Et il ferait beau voir qu’il ne le fût point puisque sur scène, c'est pas pour dire mais ça balance terrible (comme le chantait Zanini). 
Marcel Zanini : 1 galure + 1 moustache = tout 1 programme!
 C’est du post hard bop de haute volée, très intelligemment repensé, revécu avec le cœur, les tripes et une énorme paire de… feuilles (je sais : vous vous attendiez à ce que je tape en-dessous de la ceinture, mais macache : Max Granvil n’est jamais là où vous l’attendez, embusqués dans les fourrés, tapis parmi les fougères arborescentes — car le jazz, et l’écriture dessus, sont the sound of surprise, j’te f’rai dire !). 
foutues fougères zarbi récentes
Donc ça sonne d’enfer et chaque membre du quintet a sa sonorité bien à lui, dont la somme quasi mathématique (je pose 2 et je retiens mon souffle) façonne un son de groupe é-nor-me !
Clovis, le leader (charismatique ? Me faites pas chier avec vos clichés !), est quasi planqué derrière les souffleurs (c’est assez dire qu’il ne se met pas en avant et ne vole pas la vedette à ses sidemen) mais c’est lui qui mène son monde et qui arrange la sauce.
Après un « The Blessing », d’Ornette, pris à un tempo d’enfer (Satan l’habite croix-je entendre : par le sang de Jesus Harold Christ, y’ en a qui aiment le chécli  par ici !),
Clovis nous offre une ballade de sa plume qu’il dédie à Jon Boutellier, le ténor au timbre magnifique qui prendra le premier solo : un chorus superbement bien construit et  bien senti, suivi par la trompette en apesanteur d’un Fabien Mary fort inspiré. 
Jon B.















Fabien M.

















Le thème est tout juste beau. Ca c’est de la ballade, et franchement on croirait un standard tant les harmonies et la mélodie sont évidentes sans être banales. Clovis avouera d’ailleurs qu’il s’est inspiré de la grille d’«E.S.P.», le morceau que Wayne Shorter écrivit pour Miles en 1965.
Le tune suivant est une autre compo du bassiste-leader en hommage à my main man Tom Harrell !
My main man Tom H.

Fichtre-foutre, ce diable de Clovis veut nous faire mourir de plaisir, crever de bonheur comme de foutus rats swingophiles dans leur cave à jazz ! La basse soutient l’ensemble d’une façon à la fois souple et cadrée, comme on l’attend d’un héritier de Mingus et de Paul Chambers (entre autres) et les souffleurs s’envolent sur la grille comme de foutus oiseaux décollant d’une putain de branche. 
Quintet de birds s'apprêtant à décoller (sur la branche supérieure, montrant son cul, leur manager)
Suit un solo de piano (Tony Tixier, j’vous f’rai dire — et c’est TOUT dire !) d’une beauté et d’une finesse renversante tandis que la rythmique basse/batterie — Luca Santaniello (dm), celui des 5 que ne connais pas et que je découvre avec grand plaisir —  booste le groove derrière les 88 touches. 
Tony T.


















Luca S.





















Suit un solo de contrebasse (quand le tambour s’arrête… vous connaissez la blague…) sauf que là ça ne rigole pas du tout. Ca sourit plutôt avec un son rond et doux, droit et ductile. La basse comme on l’aime, quoi ! (Et que ceux qui n’aiment pas ça s’étouffent dans leurs propres déjections, et que leur agonie soit lente et douloureuse, comme d’hab’. Non mais!…).
Suit (je C : 3x « suit » ça fait beaucoup, mais temps pis) un duo sax/basse sur « On the Sunnyside of the Street ». Bon, là, c’est plié ! Il n’y a plus le moindre doute : ce satané Clovis Nicolas veut notre mort (de plaisir, œuf corse), et pour tout dire il exagère. Ce qu’il nous fait endurer, aucune bête au monde n’y survivrait.
C’est trop. Maman ! Papa ! Venez rechercher votre fiston qui défaille de bonheur au Sunside (mais si, vous savez, rue D Lombards, près du foutu Chatelet, à deux pas de la Tour St. Jacques d’où Blaise Pascal faisait tomber des caillasses pour calculer je C plus trop quoi). Et dites à l’ambulance de se magner le train parce que là il n’en peut plus votre aîné. Il agonise !
Après votre ambulance, vous prendrez bien 1 hélicoptère?
Statue du gars Blaise sous la Tour St. Jacques
Et voilà un morceau up tempo pour le réveiller ou l’achever (on verra bien, au point où on en nait !).
Il a survécu et peut entendre le rappel (et il eut fait beau voir qu’il n’y en eût point — y’a pas à dire : un petit imparfait du subjonctif de temps entend, ça le fait, niet ?). C’est un très beau tempo moyen qui coule deux sources et dans lequel le band se coule comme dans des putains de charentaises bordées de groove et pas du tout pantouflardes (non mais vous n’y êtes pas : rien que l’idée de l’avoir cru possible montre que vous n’y étiez pas — d’ailleurs je ne vous ai pas vus avec mes yeux de lynx myope, et de ce fait binoclard). 
Charentaises (la bordure de groove est en option)
Allez, va, vous savez (depuis le temps qu’on se connaît) que je suis fondamentalement bon et généreux — mais faut pas me chercher, sinon j’te défonce ta p’tite gueule — alors je V vous donner le nom du skeud que Clovis a enregistré avec son band ricain.  
Vous avez de quoi noter ? Ca s’appelle « Nine Stories » et c’est chez Sunnyside, le label du plus basque des New-Yorquais : cet excellent François Zalacain.
François Z.
Max Granvil (Qui d'autre pourrait-ce être? On se l'demande!)