Frédéric
Goaty (Fredogaty pour les intimes) a été successivement mon rédacteur en chez
adjoint puis mon directeur de la rédaction pendant les quelque 30 ans où j’ai
travaillé pour Jazz Magazine. Nous avons eu au cours de ces trois décennies une
relation globalement cordiale et parfois conflictuelle, mais jamais les choses
ne sont allées trop loin car Fred est quelqu’un d’ouvert et de profondément
humain qui a pour moi un respect équivalent à celui que j’ai pour lui. Si
Jazzmag a su évoluer au fur et à mesure que la scène jazz se transformait c’est
en grande partie grâce à lui. De surcroît il a le mérite indéniable d’avoir
créé le magazine « transversal » Muziq (puis le site muziq.fr), qui
est à ma connaissance la première et la seule revue de ce type en France voire
en Europe.
Fred
et moi n’appartenons pas à la même génération (je sais que les jeunes
d’aujourd’hui se positionnent de plus en plus en ces termes et n’ont guère de
relations qu’avec des gens de leur âge) : il a une quinzaine d’années de
moins que moi, mais Fred possède des amis de tous les âges et sa culture jazz embrasse aussi bien une partie
du passé de cette musique que les nouveautés les plus récentes. Sa culture
« tangentielle » lui permet de s’ouvrir sur des musiques cousines du
jazz et d’en enrichir les colonnes de Jazzmag.
Certes
nous ne sommes pas d’accord sur tout dans ce domaine et si je partage son
admiration pour Frank Zappa — sur lequel il est incollable et pas moi — je suis
assez indifférent à un groupe comme Snarky Puppy qu’il porte aux nues depuis
son apparition voici une demi douzaine d’années. Je ne suis pas non plus, comme
lui, fan de jazz rock, de funk, de rap, de soul, de Prince… — sur lequel il a
écrit en collaboration avec un ami un volumineux bouquin.
Je
suis plus jazz-jazz, et plus acoustique qu’électrique dans mes goûts. Mais nous
avons toujours pu échanger sur ces diverses musiques et il m’a envoyé voici
quelques lustres (avant que tout soit disponible via Youtube, Deezer ou
Spotify), sur un CD gravé, une compilation du groupe Steely Dan que je ne
connaissais pas et il m’a globalement convaincu de leur valeur.
Bien
qu’il soit dans différents domaines un spécialiste reconnu — que les radios
appellent ponctuellement pour présenter un artiste en visite à Paris ou
récemment décédé — Fred est par goût un pédagogue et un vulgarisateur hors
pair. Il donne à ses heures perdues des conférences ouvertes à tout public et
qui, à ma connaissance, recueillent un franc succès. Convertir M. et Mme Tout
le Monde au culte de Miles Davis — une de ses idoles, qu’il a eu la chance de
pouvoir interviewer — est une de ses marottes préférées.
Les échanges
fructueux que j’ai pu avoir avec lui au fil des ans ne sont pas si courants au
sein de la rédaction d’une revue comme Jazzmag. On se lit, on se croise lors de
concerts en clubs, en salle ou en festivals mais on ne discute pas tant que ça
de nos goûts respectifs et on en débat
encore moins.
Avec
Fred, ces échanges ont toujours été possibles et je crois l’avoir
« branché » au fil des ans sur des musiciens aussi
différents que la chanteuse Dianne Reeves, le pianiste Philippe le Baraillec ou
le groupe rock des années 70 Quicksilver Messenger Service, sur lequel il m’a naguère
demandé d’écrire dans les colonnes de Muziq.
Aujourd’hui
que j’ai quitté Jazz Magazine sans me fâcher avec Fred j’entends bien prolonger
de façon informelle cette relation personnelle et je suis sûr que nous en
tirerons tous deux profit et plaisir.
Fredogaty
est définitivement un de mes « main men ».
Longue
vie à lui et aux causes qu’il défend.
Max
Granvil
De gauche adroite Fredogaty, Guy Darol (je crois) et La Berge |
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