Malgré
sa population d’à peine plus de cinq millions d’habitants la Norvège est l’un
des pays les plus créatifs qui soient dans le domaine du jazz.
Mon
collègue et ami Luca Vitali a rendu compte de cette spécificité dans un ouvrage
uniquement publié en italien et en anglais, « The sound of the
North », dans lequel il retrace l’historique de cette originalité.
Hubro,
un jeune label norvégien, est typiquement représentatif de la manière
norvégienne d’envisager la créativité jazzistique. On n’y trouvera pas
d’exemples de jazz classique ou traditionnel : les Norvégiens regardent
peu en arrière et valorisent particulièrement l’innovation et les jeunes
musiciens, même si des stars internationalement établies et septuagénaires tels
que le saxophoniste Jan Garbarek ou le guitariste Terje Rypdal sont toujours actifs.
Sur
Hubro, on pourra donc entendre des musiciens dont la carrière se limite encore souvent
à la scène norvégienne, ou au mieux scandinave.
Parmi
ceux-ci, on entendra aussi bien des musiciens assumant seuls toutes les parties
instrumentales de leur disque — tel le percussionniste et multi-instrumentiste
Erland Dahlen — que de grandes formations comme le Trondheim Jazz Orchestra.
On y entendra aussi bien un instrument traditionnel du folklore norvégien, comme le violon hardanger d’Anne Hutta, que des effets électroniques — et ce parfois sur le même enregistrement.
On y entendra aussi bien un instrument traditionnel du folklore norvégien, comme le violon hardanger d’Anne Hutta, que des effets électroniques — et ce parfois sur le même enregistrement.
Hubro
est donc ouvert à tous les possibles de la scène contemporaine norvégienne et
maintient sur l’ensemble de sa production une qualité constante aussi bien au
niveau proprement musical qu’à celui de l’enregistrement.
La
variété des formations que propose le catalogue Hubro est proprement sidérante
et on s’étonne qu’un si petit pays recèle une telle diversité de groupes
musicaux.
La
raison en est que les musiciens Norvégiens ont très tôt découvert la
possibilité de faire sonner le jazz à leur façon grâce à des musiciens
américains expatriés tels que George Russell ou à des disciples du
pianiste-pédagogue Lennie Tristano qui, dès les années 60, leur ont conseillé
de puiser dans leur riche fonds musical folklorique et de s’éloigner du modèle étatsunien,
particulièrement le hard bop alors dominant.
Si
l’on ajoute à cela l’intérêt précoce des Norvégiens pour la technologie
informatique, on obtient des mélanges inédits et un spectre musical d’une
largeur inégalée.
Mr. George Russell avec un tout jeune Jan Garbarek |
Il
faut ajouter à cela la présence en Norvège d’institutions pédagogiques telles
que le remarquable conservatoire de Trondheim, dont sont issus nombre de
musiciens ayant connu depuis une carrière internationale comme le pianiste Tord
Gustavsen, le trompettiste Mathias Eick ou le saxophoniste Trygve Seim.
En
Norvège tout n’est pas concentré dans la capitale, Oslo, et des villes telles
que Trondheim — justement —, Bergen ou Stavanger sont d’importants viviers
musicaux. Cette décentralisation permet une proximité de la musique par rapport
au public et aux nouveaux musiciens, lesquels trouvent facilement le moyen
d’exprimer leur personnalité propre parce qu’ils
bénéficient d’un accueil curieux et
bienveillant de la part de leurs aînés comme de celle des auditoires auxquels
ils proposent leur musique.
Hubro
a chois de rendre compte de cette créativité essentiellement juvénile et
diversifiée, et c’est quasiment un cas unique en Europe, voire dans le monde.
Un
label à découvrir, donc, pour se décloisonner les oreilles et pour le pur
plaisir d’entendre des musiques inédites qui déploient des couleurs sonores
dignes des aurores boréales.
Max Granvil
A consulter : hubromusic.com
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