jeudi 20 juin 2019

Fredogaty, my main man


 
Frédéric Goaty (Fredogaty pour les intimes) a été successivement mon rédacteur en chez adjoint puis mon directeur de la rédaction pendant les quelque 30 ans où j’ai travaillé pour Jazz Magazine. Nous avons eu au cours de ces trois décennies une relation globalement cordiale et parfois conflictuelle, mais jamais les choses ne sont allées trop loin car Fred est quelqu’un d’ouvert et de profondément humain qui a pour moi un respect équivalent à celui que j’ai pour lui. Si Jazzmag a su évoluer au fur et à mesure que la scène jazz se transformait c’est en grande partie grâce à lui. De surcroît il a le mérite indéniable d’avoir créé le magazine « transversal » Muziq (puis le site muziq.fr), qui est à ma connaissance la première et la seule revue de ce type en France voire en Europe.
Fred et moi n’appartenons pas à la même génération (je sais que les jeunes d’aujourd’hui se positionnent de plus en plus en ces termes et n’ont guère de relations qu’avec des gens de leur âge) : il a une quinzaine d’années de moins que moi, mais Fred possède des amis de tous les âges et sa  culture jazz embrasse aussi bien une partie du passé de cette musique que les nouveautés les plus récentes. Sa culture « tangentielle » lui permet de s’ouvrir sur des musiques cousines du jazz et d’en enrichir les colonnes de Jazzmag.
Certes nous ne sommes pas d’accord sur tout dans ce domaine et si je partage son admiration pour Frank Zappa — sur lequel il est incollable et pas moi — je suis assez indifférent à un groupe comme Snarky Puppy qu’il porte aux nues depuis son apparition voici une demi douzaine d’années. Je ne suis pas non plus, comme lui, fan de jazz rock, de funk, de rap, de soul, de Prince… — sur lequel il a écrit en collaboration avec un ami un volumineux bouquin.
Je suis plus jazz-jazz, et plus acoustique qu’électrique dans mes goûts. Mais nous avons toujours pu échanger sur ces diverses musiques et il m’a envoyé voici quelques lustres (avant que tout soit disponible via Youtube, Deezer ou Spotify), sur un CD gravé, une compilation du groupe Steely Dan que je ne connaissais pas et il m’a globalement convaincu de leur valeur.
Bien qu’il soit dans différents domaines un spécialiste reconnu — que les radios appellent ponctuellement pour présenter un artiste en visite à Paris ou récemment décédé — Fred est par goût un pédagogue et un vulgarisateur hors pair. Il donne à ses heures perdues des conférences ouvertes à tout public et qui, à ma connaissance, recueillent un franc succès. Convertir M. et Mme Tout le Monde au culte de Miles Davis — une de ses idoles, qu’il a eu la chance de pouvoir interviewer — est une de ses marottes préférées.
Les échanges fructueux que j’ai pu avoir avec lui au fil des ans ne sont pas si courants au sein de la rédaction d’une revue comme Jazzmag. On se lit, on se croise lors de concerts en clubs, en salle ou en festivals mais on ne discute pas tant que ça de nos goûts respectifs  et on en débat encore moins.
Avec Fred, ces échanges ont toujours été possibles et je crois l’avoir « branché » au fil des ans sur des musiciens aussi différents que la chanteuse Dianne Reeves, le pianiste Philippe le Baraillec ou le groupe rock des années 70 Quicksilver Messenger Service, sur lequel il m’a naguère demandé d’écrire dans les colonnes de Muziq.
Aujourd’hui que j’ai quitté Jazz Magazine sans me fâcher avec Fred j’entends bien prolonger de façon informelle cette relation personnelle et je suis sûr que nous en tirerons tous deux profit et plaisir.
Fredogaty est définitivement un de mes « main men ».
Longue vie à lui et aux causes qu’il défend.
Max Granvil
De gauche adroite Fredogaty, Guy Darol (je crois) et La Berge

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